La ferme d'Hurtebise était, avant la Grande Guerre, une ancienne ferme cistercienne de l'abbaye de Vauclair. Elle fut le lieu d'âpres combats dès septembre 1914, où elle fut prise et perdue de nombreuses fois avant d'être finalement abandonnée aux Allemands, en feu et en ruines, par les Français. Le 16 avril 1917, c'est ici que la 10ème division d'infanterie coloniale, composée des 33ème, 52ème et 53ème régiments d'infanterie coloniale, ces deux derniers comportant des bataillons sénégalais, combattit dans ce qui restait de la ferme. Des combats qui perdurèrent jusqu'en septembre.
Ce monument est situé face à l'entrée de la ferme d'Hurtebise. Le 7 mars 1914, une commémoration eut lieu à cet endroit pour fêter le centième anniversaire de la victoire de la bataille dite de Craonne, remportée par Napoléon 1er. Au cours de cette bataille, l'Empereur utilisa le moulin de l'abbaye de Vauclair, qui se trouvait à quelques centaines de mètres à l'est de cette ferme, comme observatoire. Aujourd'hui, une statue le représentant a été érigée, et inaugurée le 30 juin 1974, sur un tertre placé sur les vestiges de ce moulin, qui a été détruit au cours de la Grande Guerre (photo 2).
Cette bataille de Craonne fut la dernière victoire de l'Empereur. Ce soir là, déjà, 12.000 morts jonchaient le champ de bataille. On érigea alors un monument. Un monument au pied duquel les fleurs continuaient de fâner quand les premiers combats de la Grande Guerre eurent lieu ici. Et tout au long de la guerre, il continua à être un objectif alors qu'il n'était plus que ruines en septembre 1914 et même plus poussières en 1917.
Après guerre, on érigea alors l'actuel monument qui unit dans un même élan le soldat de l'Empire au Poilu de 14-18. Sur une plaque, on peut lire : "A la vaillance de la jeunesse française. Marie Louise de 1814, Bleus de 1914 unis dans une même gloire". Ce terme de "Marie Louise" est le nom donné aux jeunes soldats de l'Empereur, en honneur à l'Impératrice, mais également celui donné à la "classe 16", c'est-à-dire les mobilisés qui avaient vingt ans en 1916. A ce propos, et contrairement à ce que l'on peut lire sur la plaque, la classe 14 reçut le nom de "biquets", tandis que classe 17 reçut celui, plus connu, de "bleuets". Et, curieusement, les autres classes n'eurent pas droit à leur surnom.
Alain Pouteau - Publié
Crédits photographiques : © Alain Pouteau
Lecture : Les fantassins du Chemin des Dames de R.G. Nobécourt - éditions Bertout mais aussi Le Chemin des Dames 1914-1918 sous la direction de Denis Defente - éditions Somogy